C’est un soulagement pour les clients et pour la profession. L’ordonnance du 15 avril vient annuler la prorogation des délais de rétractation, de réflexion ou de renonciation qui figurait à l’article 2 de l’ordonnance du 25 mars. L’occasion pour nous de revenir sur l’ensemble des délais légaux qui entourent une vente immobilière après la signature de la promesse de vente.
Les délais de rétractation, de réflexion ou de renonciation lors d’une vente immobilière
Toutes les transactions immobilières disposent d’un certains nombres de délais de rétractation au profit soit du vendeur ou de l’acquéreur.
Dans le cas où le vendeur mandaterait un professionnel de l’immobilier, ce dernier est engagé contractuellement avec l’agent immobilier par un mandat de vente. Celui-ci comprend tous les droits et devoirs du mandant et mandataire y compris un délai de 14 jours de rétractation en application des dispositions des articles L. 221-18 et suivants du Code de la consommation. Le délai commencera à courir le premier jour qui suit la conclusion du mandat et prendra fin à l’expiration de la dernière heure du dernier jour du délai. Si ce délai expire un samedi, un dimanche ou un jour férié ou chômé, il est prorogé jusqu’au premier jour ouvrable suivant. La plupart du temps, il est possible de pallier à ce droit si le mandant accepte expressément l’exécution du contrat précisé dans ledit mandat.
Puis, dans le cas d’un compromis de vente, soit le premier engagement vers une transaction immobilière entre un vendeur et un acquéreur, ce document indique les droits et devoirs des parties. Notamment un délai de réflexion supplémentaire de 10 jours. En effet, l’acquéreur dispose d’un droit de rétractation en application des dispositions de l’article L.271-1 du Code de la construction et de l’habitation. Le délai est notifié par lettre recommandé avec accusé de réception et compte à partir du lendemain de la première présentation de la lettre lui notifiant l’acte.
Enfin, l’acquéreur dispose de protections supplémentaires notamment s’il a recours à un crédit immobilier pour financer son projet. En effet, l’acquéreur dispose alors d’un délai de réflexion supplémentaire. Ce délai est incompressible et est de 10 jours à compter de la date de réception des offres de prêt.
Cependant, le Covid-19 est venu bouleversé tout ça. En effet, se pose alors plusieurs questions. Les différents délais de retractation sont-ils annulés ? Repoussés ? Les différents acteurs se mobilisent avec les pouvoirs publics pour trouver des solutions. Une première ordonnance, celle du 25 mars 2020 a apporté des premières réponses. Elle a été améliorée par l’ordonnance rectificative du 15 avril dernier.
Que prévoyait l’ordonnance du 25 mars 2020 ?
Le Gouvernement et le Conseil Supérieur du Notariat ont cherché à s’adapter à la situation sans précédent dans laquelle nous nous trouvons. Il faut saluer leur réactivité. Rappelons les faits. Le 25 mars dernier, le gouvernement annonce par ordonnance un certain nombres de mesures visant à assurer la continuité de l’activité de transaction immobilière malgré le confinement, dans un contexte de crise sanitaire. S’ensuit, le 3 avril, la publication d’un décret autorisant l’acte notarié à distance pendant la période d’urgence sanitaire.
Concernant l’autorisation de signature à distance, elle a vraiment été accueilli comme un soulagement par toute la profession. Notaires et agents immobiliers. En effet, bon nombre de nos clients se retrouvaient bloqués, sans savoir quand ni comment ils allaient pouvoir poursuivre leur projet. Cependant, comme toujours, il y a la théorie, et la pratique. En effet, à ce stade, seulement 40% des études notariales peuvent réaliser cette prestation par manque d’équipement. Par ailleurs, même si certains de nos clients arrivent à finaliser la signature de leur acte authentique, il leur ai impossible de prendre possession ou de quitter les lieux pour le moment. Les déménagements restant interdits, tout comme les déplacements.
S’agissant des délais de rétractation, de réflexion ou de renonciation, l’ordonnance du 25 Mars 2020 posait l’aménagement suivant :
- Si le droit de rétractation devait expirer avant le 12 mars 2020, le processus de vente se poursuit comme en temps normal et aucune prolongation du délai de rétractation n’est prévue.
- Si le droit de rétractation devait prendre fin entre le 12 mars 2020 et un mois après l’arrêt de l’état d’urgence sanitaire (soit le 24 juin 2020), ce délai est prolongé : il ne commençait alors à courir qu’à compter du 24 juin 2020 pour prendre fin le 3 juillet. Cela signifiait que pour tous les avant-contrats dont le délai de rétractation arrive à terme entre le 12 mars 2020 et le 24 juin 2020, ce délai était repoussé, et la finalisation de l’opération tout autant !
Au-delà de la contrainte opérationnelle que peut représenter une telle décision, c’est aussi la charge financière que cela peut représenter pour nos clients acquéreurs qui ne souhaitent pas payer au prorata temporis des charges plus importantes (exemple de la taxe foncière ou des charges de co-propriété). Par ailleurs, qui dit délais repoussés, dit aussi que l’acquéreur peut avoir à assumer une charge de prêt, sans avoir la pleine jouissance de son logement. Parfois même, certaines opérations risquent d’être annulées. Notamment celles où le compromis de vente prévoie une clause suspensive pour octroi de prêt.
Une modification de cette décision grâce à l’ordonnance du 15 Avril 2020
L’ordonnance modificative du 15 avril 2020 est venu préciser et surtout annuler certains éléments vus comme des freins pour les professionnels de l’immobilier et Notaire.
Ainsi, l’article 2 « n’est pas applicable aux délais de réflexion, de rétractation ou de renonciation prévus par la loi ou le règlement, ni aux délais prévus pour le remboursement de sommes d’argent en cas d’exercice de ces droits ».
Par conséquent, sont exclus le délais de rétractation de 14 jours pour toute signature d’un mandat de vente, le délai de rétractation de 10 jours alloué à l’acquéreurs après la signature d’un avant-contrat de vente et le délai de réflexion de 10 jours dont dispose l’emprunteur pour valider son financement.
Cette modification permet ainsi aux professionnels de l’immobilier de sécuriser leurs ventes, tout en protégeant leurs clients contre le risque d’annulation de leur opération de vente ou d’achat.
Les délais de préemption des Mairies s’adaptent également face à l’état de confinement
Lors d’une transaction immobilière, plus précisément au moment de la signature d’un avant-contrat comme un compromis de vente, le vendeur mandate le notaire afin de constituer le dossier d’usage et d’authentifier la vente.
Après la signature du compromis de vente, le notaire informe la Mairie qu’une transaction est en cours de réalisation et que cette dernière peut se positionner et acheter le bien à la place de l’acquéreur. Cette demande est une Déclaration d’Intention d’Aliéner (DIA) envoyée par courrier informant que la Mairie dispose d’un délai de 2 mois à compter de la date de réception du récépissé pour acquérir en priorité le bien. Momentanément suspendue, la vente pourra ainsi être réalisée lorsque le bénéficiaire aura expressément déclaré y renoncer ou pas.
En cas de préemption, l’acquéreur reprendra sa pleine et entière liberté sans aucune formalité. Le séquestre versé sera intégralement restitué. Par conséquent, la Mairie sera subrogé de tous les droits et devoirs de l’acquéreur y compris des honoraires de négociations.
Aujourd’hui en tant de Guerre comme a pu nous le préciser le Président de la République, toutes les administrations sont contraintes de s’adapter. Une crise exceptionnelle, réponses exceptionnelles.
En effet, les articles 1, 7 et 8 de l’ordonnance du 25 mars 2020 sont venus précisés et aménagés les délais légaux notamment pour le traitement des DIA.
Par conséquent, si une Déclaration d’Intention d’Aliéner fut envoyée avant le 12 mars dernier, le délai est alors suspendu et ne reprendra qu’à la fin de l’Etat d’Urgence Sanitaire soit le 25 mai. Le délai se verra ajourné d’un mois supplémentaire comme le précise l’article 1 et 8 de l’ordonnance. En clair, s’il manquait 1 semaine avant la fin du délai, l’acte notarié ne pourra être signé que début juillet.
Cependant, si une DIA est envoyée au delà du 12 mars, le délai de 2 mois accordé aux Mairies est tout bonnement annulé et ne courra qu’à la levée de l’état d’urgence sanitaire soit le 25 mai 2020. Cette décision lourde de conséquence pour les vendeurs comme acquéreurs engage donc un retard important au minima jusqu’au 25 juillet prochain.
Malgré tout, certaine commune telle que Bordeaux tente de s’adapter rapidement avec des plateformes où les notaires peuvent y faire leur demande de DIA. Celles-ci ne seraient pas impactées et seraient traitées quasiment instantanément.